Cette journée a été extrêmement fertile, elle a montré la richesse et la diversité des initiatives dans ce domaine des énergies marines où la technologie est en cours de déploiement. Pierre David disait ce matin que le stade de la recherche coûtait 1, celui du développement 10 et celui de la diffusion 100. Il est important que l’on puisse assez vite mettre en place les processus qui permettent de maîtriser le foisonnement et d’éliminer les impasses en permettant de concentrer les moyens sur les technologies les plus profitables. Mais c’est toujours facile de commenter le développement technologique a posteriori et d’expliquer pourquoi telle technologie s’est imposée. C’est facile de faire des « prévisions » sur le passé, c’est beaucoup plus difficile de le faire sur l’avenir.
Nous sommes donc collectivement devant ce problème d’un foisonnement d’initiatives et de la nécessité de trouver des méthodes pour faire le tri. Bien entendu la première méthode, celle a laquelle on pense en premier, c’est le marché. Mais ces technologies sont en forte interaction avec des milieux et des problèmes qui ne relèvent pas seulement du marché. Il convient donc de faire intervenir d’autres critères dans les choix. Il est nécessaire de développer des méthodes d’évaluation qui permettent de retenir des technologies rentables mais qui en même temps dans leur mode de déploiement n’ont pas d’effets pervers sur les autres usages de la mer et d’une certaine façon en condamneraient à terme le développement d’ensemble. Le problème de l’acceptabilité sociale est très important, ce sera le thème de la séance de demain matin.
En terme de politiques nous avons à notre disposition trois types d’approches : ·
– La première est l’approche « push » – je suis désolé mais nous n’avons pas de terme en français. Elle consiste à pousser les technologies, les pouvoirs publics choisissent les technologies qu’ils veulent promouvoir. ·
– Une autre approche est le « pull », qui consiste à tirer la technologie par le marché. Les prix préférentiels de rachat relèvent de ce domaine qui facilite l’entrée dans le marché de nouvelles technologies, sans qu’il y ait de choix technique de la part des pouvoirs publics. C’est le marché, c’est à dire le secteur privé, qui fait le choix et assume une grande part des risques. ·
– Il y a un processus intermédiaire que nous pouvons sans doute développer ensemble, qui mobilise les deux et qui relève de la gouvernance : d’une relation et d’un dialogue privé/public qui permet de faciliter le déploiement de ces technologies.
J’ai identifié dans les débats 5 thèmes dont la maîtrise me paraît nécessaire pour faciliter ce déploiement et qui pourraient être des domaines de coopération entre nos deux pays :
– Il faut avancer sur la typologie des technologies, j’ai été très intéressé par les exposés extrêmement structurés sur ce thème. Une typologie des différentes technologies permettrait aussi de structurer les approches sur les impacts. Elle nous permettrait de faire cette évaluation, dont je parlais au-dessus, et de faciliter ce tri des technologies sur des bases communes. Il serait possible d’organiser des évaluations communes sur des sous-ensembles de technologies.
– Les questions liées à la cartographie et à l’aménagement du territoire marin, j’ai vu que les travaux ont commencé. Il s’agit certes de la cartographie des ressources mais aussi celles des autres usages des mers et des milieux : les zones naturelles, les zones de pêche, les zones de trafic maritime qui permettront de croiser les contraintes et de trouver des lieux vers lesquels orienter les acteurs, là où c’est faisable c’est à dire rentable mais aussi acceptables pour les autres usagers du milieu.
– J’ai cité l’importance des systèmes de gouvernance et d’évaluation, je crois qu’il est nécessaire de développer des approches de recherche sur ces sujets qui permettent de comparer la diffusion des innovations dans d’autres domaines et de nous permettre de piloter ce processus d’ensemble. J’ai vu une étude intéressante comparant les énergies marines avec l’éolien et permettant de situer le prix d’entrée du marin en dessous du prix historique d’entrée de l’éolien ce qui nous fait espérer des futurs développements. Nous devons avoir un recul scientifique d’évaluation sur ces politiques, sur laquelle nous pouvons coopérer.
– Le quatrième champ est celui de la normalisation, de la certification, de la qualification technique et de la métrologie. Cette capacité va des bassins d’essais à des techniques plus précises. Nous avons dans le domaine des matériaux par exemple, une expérience qui peut être tirée de l’exploitation pétrolière off shore, on donc sur certaines questions nous disposons de bases solides. Il y a là des domaines de coopération, car tout le monde sait que la normalisation facilite la fluidité des marchés.
– Le dernier champ qui n’est pas le moins important, est la mobilisation des moyens financiers privés comme publics ; la mobilisation des capitaux qui permettront l’émergence de ces technologies.
Ces 5 pistes peuvent servir de base à des coopérations futures.
La question qui reste, est que certains de ces domaines progresseront mieux par la compétition et d’autres sur la coopération nous devons coopération. Nous devons identifier les thèmes de coopération entre nos deux pays, mais aussi les thèmes de coopération entre le privé et le public. Où doit-il y avoir la coopération et ou il faut-il laisser le libre jeu de la compétition dont on sait que c’est un puissant moteur d’innovation ?
Voilà quelques éléments auxquels je pense que nous devons trouver des réponses, ce soir et demain. Cela nous permettra d’avoir une feuille de route de nos travaux communs. Je vous remercie de votre attention et cède la parole à Alan Moore.