Les Stratégies de développement durable, instruments de cohérence des politiques

Résumé

De nombreuses approches des stratégies nationales de développement durable (SNDD) ont été proposées depuis 1992. Elles ont en commun certaines composantes. La stratégie nationale d’un pays doit être conçue de façon à aider à traduire les questions environnementales sur le plan politique. Plus largement, elle doit coordonner les politiques locales avec les questions mondiales, et intégrer les connaissances scientifiques dans les politiques et la planification du développement .

Le mécanisme d’examen par les pairs des stratégies nationales a été inauguré à titre pilote par la France, avec la participation de représentants de pays du Nord et du Sud et de diverses parties prenantes. Le processus d’examen par les pairs permet aux pays de partager leur expérience et leur information, et peut les aider à identifier leur propre voie de développement durable.

Le secteur privé commercial peut aussi contribuer au développement durable en apportant des biens publics au niveau local et au niveau mondial. Un autre intrant du développement durable peut provenir de l’Organisation Internationale de Normalisation (ISO) et de sa Norme d’orientation sur la Responsabilité sociale (ISO 26000), vue comme un mécanisme de coordination entre les initiatives bénévoles et les obligations contraignantes (telles que les conventions internationales). Les normes et lignes directrices de l’ISO doivent donc être intégrées aux stratégies nationales de développement durable et aux cadres locaux de l’Agenda 21 .

Mots clés : Stratégie nationale de développement durable (SNDD), Charte de l’Environnement, Revue par les pairs, Partage d’expérience, Gouvernance, Environnement d’intégration, Intégration des politiques, Cohérence des politiques, Responsabilité sociale.


1. Introduction. Le contexte international

Le premier appel à la mise en œuvre d’une stratégie nationale de développement durable (SNDD) date de la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement (CNUED) à Rio en 1992. Pour citer l’Agenda 21, « Chaque pays devrait dresser, dans les plus brefs délais et, si possible, d’ici à 1994, la liste de ses besoins en matière de renforcement des capacités et moyens, afin de mettre au point ses propres stratégies de développement durable… » (ONU 1992:451, §37.4a), et « Il serait important pour la planification d’ensemble que chaque pays s’efforce d’obtenir, à tous les niveaux de la société, un consensus sur les politiques et les programmes nécessaires pour renforcer, à court et à long terme, sa capacité d’appliquer son programme d’Action 21. Ce consensus devrait résulter d’un dialogue entre les différents groupes d’intérêts concernés… » (ONU, 1992:452, §37.5). Ainsi, l’Agenda 21 reconnaît que l’énorme tâche impliquée par le développement durable requiert une approche ordonnée, c’est-à-dire une stratégie.

Cinq ans plus tard, en 1997, la Session spéciale de l’Assemblée Générale de l’ONU a constaté une détérioration constante de l’état de l’environnement mondial sous la pression combinée de modes non durables de production et de consommation, et de la croissance démographique. Cette évaluation a amené les gouvernements à intensifier leurs efforts en fixant une nouvelle échéance en 2002 pour « la formulation et l’élaboration de stratégies nationales de développement durable » (ONU, 1997:10, §24a).

Un des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) adoptés par 147 chefs d’États du monde au Sommet du Millénaire de l’ONU en 2000 concerne la durabilité environnementale et fixe une cible (mais aucune date) pour « intégrer les principes de développement durable dans les politiques nationales et inverser la tendance actuelle à la déperdition de ressources environnementales » (OMD 7, cible 9). Le processus de SNDD offre un mécanisme efficace pour atteindre cette cible. De leur côté, les stratégies nationales doivent trouver des moyens de répondre à tous les Objectifs du Millénaire pour le Développement et d’atteindre les cibles correspondantes.

Le Sommet mondial sur le Développement durable (SMDD) de 2002 à Johannesburg a appelé tous les pays à « progresser dans la formulation et l’élaboration de stratégies nationales de développement durable et commencer à les mettre en œuvre d’ici à 2005. » (ONU 2002a: §162b). Il encourage les « autorités compétentes à tous les niveaux à prendre le développement durable en considération lorsqu’elles prennent des décisions, y compris celles ayant trait à la planification du développement à l’échelon national ou local, à l’investissement dans les infrastructures, au développement du commerce et aux marchés publics. Il s’agit notamment d’agir à tous les niveaux pour …] fournir un appui à l’élaboration de stratégies et de programmes de développement durable, y compris pour la prise de décisions concernant l’investissement dans les infrastructures et le développement du commerce… » ([ONU 2002a: §162b).

Dans un effort parallèle, le Comité d’Aide au Développement de l’Organisation pour la Coopération Économique et le Développement (OCDE) a fixé la date cible de 2005 pour que les stratégies nationales s’engagent dans le processus de mise en œuvre. C’est l’un des sept objectifs de développement international (ODI) convenus par l’OCDE en 1996 : « Durabilité et régénération de l’environnement : Une stratégie nationale de développement durable (SNDD) doit être en place et en voie d’application, dans chaque pays, d’ici 2005, de façon à ce que les tendances actuelles à la déperdition des ressources environnementales soient effectivement inversées, aux niveaux mondial et national, d’ici à 2015. (objectif découlant d’un engagement pris à la CNUED de Rio de Janeiro) » (OCDE/CAD, 1997). Ces objectifs étaient basés sur des cibles convenues par la communauté internationale lors de plusieurs conférences de l’ONU.

Comme la date de 2005 fixée à Johannesburg est maintenant passée, il semble que ce soit le bon moment pour la Commission sur le Développement pour réexaminer l’ensemble du processus de SNDD. Un tel réexamen bénéficierait de l’expérience variée de divers pays dans la mise en œuvre de leurs stratégies. La France appuie énergiquement l’idée de faire de la CDD un point focal à cet égard, pour permettre le partage des bonnes pratiques, fournir un cadre d’analyse et organiser l’échange d’expériences. De fait, il a été proposé à l’Assemblée générale de l’ONU en 1997 que la CDD puisse « offrir un cadre pour l’échange de données d’expérience relatives aux initiatives régionales et sous-régionales ainsi qu’aux mesures de collaboration régionale qui visent à favoriser le développement durable. A cette fin, elle pourrait notamment encourager les pays à échanger, volontairement et à l’échelon de chaque région, des données d’expérience sur la mise en oeuvre d’Action 21 et, en particulier, à rechercher des modalités qui, dans une région donnée, permettraient aux pays désireux de le faire de procéder à des examens mutuels » (ONU, 1997 §133c).

2. Les expériences nationales

Suite aux admonitions répétées par la communauté internationale en faveur de la formulation et de la mise en œuvre des SNDD, certains pays ont maintenant mis en place ce type d’approches stratégiques et lancé un ensemble d’initiatives politiques spécifiques. D’autres pays viennent tout juste d’entamer ce processus complexe, ou ne l’ont pas encore fait.

2.1. Définitions des SNDD

Différentes définitions et différents cadres pour les SNDD ont été suggérés dans des documents émanant de conférences intergouvernementales. Sur la base des conclusions du Forum international sur les Stratégies nationales développement durable, qui s’est tenu en 2001 à Accra, au Ghana pour préparer le Sommet mondial sur le Développement durable (SMDD) (août-septembre 2002), le Département des Affaires Économiques et Sociales des Nations Unies (ONU/DAES) a défini les SNDD comme : « un processus coordonné, participatif et itératif de réflexions et d’actions pour atteindre les objectifs économiques, environnementaux et sociaux de façon équilibrée et intégrée, aux niveaux national et local » (ONU 2002b :1 §3). Les participants de la réunion d’Accra ont formulé des lignes directrices pour l’élaboration et la mise en œuvre des SNDD, en soulignant l’importance de l’implication de multiples parties prenantes, de l’apprentissage et de l’amélioration continus, et du recours à des mécanismes efficaces de coordination.

Avant la conférence d’Accra, l’OCDE avait cherché, en avril 2001, à clarifier les buts et les principes sous-jacents des stratégies nationales et locales efficaces de développement durable, en considérant que ces stratégies ne devaient pas se limiter à des réussites isolées. Dans son document « Orientations pratiques pour la Coopération pour le développement » (2001), l’OCDE décrit les diverses formes que peuvent revêtir ces stratégies dans pays en développement, et propose la définition suivante des SNDD : « un ensemble coordonné de processus participatifs permettant de progresser en permanence dans les domaines de l’analyse, du débat, du renforcement des capacités, de la planification et de la mobilisation des ressources, en conciliant les objectifs économiques, sociaux et environnementaux de la société et procédant, le cas échéant, à des arbitrages » (OCDE 2001 :9). Ces orientations politiques sur les principes des SNDD, les approches possibles et la façon dont les agences de coopération pour le développement peuvent y apporter leur soutien, a été approuvé par les États membres de l’OCDE et leurs ministres concernés.

En 2002, après la publication de l’étude de l’OCDE, l’Institut International pour l’Environnement et le Développement (IIED) a compilé un recueil de ressources sur les SNDD (Dalal-Clayton et Bass 2002), financé par le Programme des Nations Unies pour de Développement (PNUD) et l’OCDE. Cette étude examine les processus existants pour élaborer des stratégies, et définit une approche ‘stratégique’ comme une approche qui « développe une vision de base, au moyen d’un processus consensuel, effectif et itératif, avant de fixer des objectifs, identifier les moyens d’y parvenir, assurer le suivi des progrès pour orienter la prochaine étape du processus d’apprentissage ». Lors des recherches réalisées pour cette étude, on avait observé que les pays semblent passer de « plans d’ensemble mal conçus, idéalisés et statiques, et d’initiatives isolées » à « des ensembles de mécanismes coordonnés et à des processus continus de suivi, d’apprentissage et d’amélioration ».

2.2. L’expérience en matière de SNDD

Au-delà des définitions telles que celles discutées ci-dessus, il faut tenir compte de l’expérience concrète. Un rapport émis par l’Institut International pour le Développement Durable (IIDD) et d’autres organismes (Swanson et al. 2004), basé sur l’étude des stratégies nationales de 19 pays, identifie les tâches clé récurrentes suivantes :

– Mécanismes de rétroaction. La création de mécanismes de commentaires comporte le suivi, l’apprentissage et l’adaptation. Elle vise à mettre en œuvre une attitude d’amélioration continue, et à changer les valeurs et les visions au travers d’un processus cognitif.
– Coordination avec le budget national. Les objectifs et initiatives stratégiques doivent être coordonnés avec et incorporés dans le processus de définition du budget national. Les efforts de ce type sont appelés intégration horizontale.
– Intégration verticale. L’intégration verticale concerne la coordination avec les entités infra-nationales et locales en vue du développement durable.
– Mise en œuvre des initiatives politiques. Une quatrième tâche importante et récurrente des SNDD concerne la mise en œuvre d’initiatives politiques, notamment les réformes fiscales, pour viser les objectifs environnementaux.

L’étude de l’IISD sur 19 pays identifie également 4 types de stratégies : complète, multisectorielle, sectorielle et intégrée.

– Les Stratégies complètes ont été utilisées par 15 pays, dont la Grande-Bretagne et les Philippines.
– Des Stratégies multisectorielles ont été mises en œuvre par quatre pays, dont le Cameroun et Madagascar dans leurs Documents de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP).
– Les Stratégies sectorielles ont été utilisées entre autres par le Canada.
– Les Stratégies intégrées combinent les approches du développement durable avec la planification existante ; ce type de stratégie a été utilisé par le Mexique et l’Inde.

2.3. Bonnes pratiques

Il convient de mentionner ici un rapport récent de l’OCDE sur les bonnes pratiques en matière de SNDD. Sur la base de l’expérience en SNDD dans les pays de l’OCDE, ce rapport a été présenté lors de la Réunion annuelle de l’OCDE des Experts en Développement durable, qui s’est tenue à Paris les 3 et 4 octobre 2005 (OCDE 2005). Il identifie huit composantes importantes des stratégies nationales : l’intégration des politiques; les considérations intergénérationnelles; l’analyse et l’évaluation; les indicateurs et les cibles; la coordination entre les institutions; la gouvernance locale et régionale; l’implication des parties prenantes; et le suivi et l’évaluation.

2.3.1. Intégration des politiques

Les stratégies nationales devraient élaborer des approches parfaitement intégrées et planifiées, et tenant suffisamment compte des trois piliers du développement durable, c’est-à-dire les questions environnementales, économiques et sociales.

2.3.2. Cadre intergénérationnel

Les stratégies nationales devraient adopter une perspective à long terme permettant d’incorporer les principes et indicateurs intergénérationnels.

2.3.3. Analyse et évaluation

Il faudrait utiliser les outils d’évaluation intégrés pour identifier tous les coûts et avantages – d’ordre environnemental, économique et social – des options politiques et stratégiques envisagées.

2.3.4. Indicateurs et cibles

Les stratégies nationales de développement durable devraient être basées sur un système d’indicateurs bien structuré. Un tel système peut nettement contribuer au suivi de l’avancement et peut être utilisé comme cible quantitative.

2.3.5. Coordination entre les institutions

Une vaste palette d’institutions, dont les ministères et les agences gouvernementales, doit être impliquée dans la formulation des stratégies nationales de développement durable et dans leur mise en œuvre. La responsabilité mondiale devrait en être attribuée au plus haut niveau de gouvernement, tel que le bureau du Premier Ministre ou son équivalent.

2.3.6. Gouvernance locale et régionale

Les autorités locales et régionales doivent être entièrement impliquées dans l’élaboration de stratégies nationales, et certains aspects peuvent en être délégués aux niveaux infra-nationaux de gouvernement.

2.3.7. Implication des parties prenantes

L’implication des parties prenantes est nécessaire pour parvenir au développement durable. Les parties prenantes (dont les entreprises, les syndicats et les ONG) doivent participer, avec les représentants du gouvernement, aux processus décisionnels portant sur la conception et la mise en œuvre des stratégies nationales.

2.3.8. Suivi et évaluation

Il faudra créer un système de suivi et d’évaluation du processus de SNDD, confié à un observateur qui effectuera un suivi de la mise en œuvre des stratégies nationales et formulera des recommandations quant à son amélioration.

À partir de la diversité des définitions, des cadres et des expériences discutés plus haut, on voit émerger certains thèmes récurrents. Les préoccupations les plus marquantes et les plus fréquentes concernant les stratégies nationales de développement durable ont trait à un passage de plans fixes traditionnels et de politiques historiquement ancrées vers un système adaptatif susceptible d’auto-amélioration continue. Les processus typiques font intervenir de larges groupes de discussion de parties prenantes, contrairement au système traditionnel imposé par les gouvernements dans des cadres restreints. La plupart des stratégies sont basées sur l’expérience concrète, aussi ne peut-on pas leur appliquer des méthodes à « taille unique ». Les politiques doivent donc être adaptées à leur contexte. À cet égard, le mécanisme d’examen par les pairs peut aider à adapter les processus et propositions génériques aux besoins propres des pays.

3. L’approche française

Deux grands évènements ont façonné l’approche française pour une SNDD : l’inclusion d’une Charte de l’Environnement dans la Constitution et l’élaboration de documents sur la SNDD en 2003.

3.1. Charte de l’Environnement

Une Charte de l’Environnement est maintenant inscrite dans la Constitution de la France. Cette Charte stipule, entre autres, que les politiques publiques devraient promouvoir le développement durable (Article 6). La place de la Charte dans la Constitution est au même niveau que le texte historique de 1789 sur les droits de l’homme, qui a une grande valeur symbolique pour la France. Ainsi, le Conseil Constitutionnel français est maintenant en mesure d’analyser la conformité des lois françaises par rapport à la Charte de l’Environnement.

3.2. Elaboration d’une SNDD

Le deuxième évènement a été la formulation, en 2003, d’une stratégie nationale de développement durable, à la question d’un processus impliquant de multiples consultations auprès de la société civile au travers du Conseil national du développement durable.

3.3. La mise en œuvre des SNDD

Bien que France ait adopté une stratégie nationale de développement durable en 1997, cette tentative n’est pas devenue opérationnelle à cause d’un changement de gouvernement. Cependant, en septembre 2002, le Président Jacques Chirac a abordé cette question dans le discours qu’il a prononcé avant le Sommet mondial sur le Développement durable (SMDD) de Johannesburg, avec la célèbre phrase « La maison brûle et nous regardons ailleurs ». Le Président Chirac a ainsi donné un nouvel élan aux efforts de développement durable fondés sur une volonté politique plus large parmi les instances du gouvernement.

En 2002-2003, une nouvelle stratégie a été conçue afin de fournir à tous les Français une vision commune des questions et des politiques nécessaires à court et moyen terme. Elle a aussi servi à spécifier les nouvelles méthodes d’intégration du développement durable dans les politiques publiques, et à suivre l’avancement. L’ambition du Gouvernement était que la France « change de cap » dans un esprit de responsabilité, de cohérence et de solidarité entre les régions, les générations et dans l’ensemble de la société civile. Il ne s’agissait pas d’un simple exercice académique ; le Gouvernement a décidé de rédiger un document de portée certes limitée par rapport au niveau mondial, mais résolument axé sur l’action et soutenu par des lignes directrices claires en vue d’une mise en œuvre rapide. L’implication des parties prenantes ayant été reconnue comme un facteur clé, un Conseil national du développement durable (CNDD) a été créé en janvier 2003 pour prendre en compte les vues de la société civile.

Ainsi, la Stratégie nationale de développement durable (SNDD) actuelle, adoptée en juin 2003, fournit au Gouvernement un cadre d’action lui permettant de prendre en compte les effets à long terme et mondiaux du développement économique et des activités des personnes. Ce cadre fournit une orientation à la politique du gouvernement concernant la planète à l’horizon de cinq ans, fixe des objectifs pratiques pour chaque ministre et, partout où cela est possible, met en place des indicateurs spécifiques d’avancement.

Le texte de la SNDD porte sur les trois dimensions du développement durable à associer (développement économique, participation sociale et protection de l’environnement) et en ajoute une quatrième : la dimension culturelle.

La stratégie est construite autour de sept axes stratégiques et dix programmes d’action, chacun assorti d’une liste détaillée d’objectifs et d’actions et centré sur des questions ou secteurs spécifiques. Chaque axe stratégique vise le rôle d’un certain groupe d’acteurs.

3.4. Dix programmes d’action

3.4.1. Social et santé

Ce programme porte sur les dimensions sociales et sanitaires du développement durable (dont l’égalité entre les sexes, la cohésion familiale, la solidarité avec les personnes handicapées ou dépendantes et l’intégration des immigrants) et comporte un plan de cohésion sociale.

3.4.2. Rôle des citoyens

Ce programme d’action voit les citoyens comme des acteurs du développement durable et inclut les dimensions de l’information, de la sensibilisation, de l’éducation et de la participation.

3.4.3. Territoires

Ce programme d’action porte sur la politique d’utilisation des terres, l’environnement urbain et la planification urbaine, le patrimoine culturel, l’environnement rural, la biodiversité, les ressources en eau, et les questions liées aux Agendas 21 locaux.

3.4.4. Activités économiques

Ce programme porte sur les activités économiques, les entreprises et les consommateurs. Il aborde les questions liées aux modes de production et de consommation, la stratégie de traitement des déchets, l’éco-innovation, la responsabilité des entreprises, la certification et l’étiquetage des produits, l’investissement socialement responsable, et les réformes fiscales.

3.4.5. Changement climatique et énergie

Le programme d’action sur le changement climatique et l’énergie porte sur les plans concernant l’énergie renouvelable et les nouvelles technologies.

3.4.6. Transports

Le programme d’action sur les transports envisage que les prix tiennent compte de l’intégralité des coûts réels, des connexions intermodales, de l’amélioration de l’efficacité énergétique de véhicules, des transports mondiaux et du développement urbain.

3.4.7. Agriculture et pêche

Le programme d’action pour l’agriculture couvre l’agriculture biologique, les pratiques agricoles saines pour l’environnement, et la recherche et développement en agriculture ; la composante Pêche vise la mise en place de pratiques de pêche sélective, la réduction de la capacité mondiale de pêche et la modernisation de la flotte.

3.4.8. Prévention des risques

Le programme d’action pour la prévention des risques, porte aussi sur la pollution et les autres problèmes d’environnement et de santé, et indique les grandes lignes d’un plan pour l’environnement et la santé. Sont également abordés les risques industriels et naturels, l’information, l’expertise et recherche, une réglementation environnementale stricte et un système juridique préventif.

3.4.9. Exemplarité de l’État

La feuille de route pour un État exemplaire comporte l’intégration des principes de développement durable dans les politiques publiques; l’action visant à réformer les règles d’approvisionnement de la fonction publique ; l’application de l’éco-responsabilité dans tous les aspects de l’administration publique ; la sensibilisation du personnel; les programmes de formation ; et la mise en place de références pour l’évaluation des tâches et leur réalisation.

3.4.10. L’action internationale

La SNDD de la France couvre aussi sa participation aux campagnes internationales, notamment la lutte contre la pauvreté (avec l’amélioration des soins de santé, l’éducation, la dynamisation de la recherche, l’accès aux services de base, le commerce équitable, et le tourisme durable), la gouvernance mondiale; la création d’une Organisation des Nations Unies pour l’Environnement (UNEO); la promotion du Protocole de Kyoto; la mise sur pied de partenariats avec les pays africains et méditerranéens et l’Union Européenne; le soutien à la diversité culturelle ; et la préservation de la langue française.

3.5. Attribution des responsabilités

Chaque ministre est responsable de la mise en œuvre et du suivi des composantes de la Stratégie qui relèvent de ses attributions. À cet effet, dans chaque ministère, un haut responsable a été chargé de veiller au développement durable et de s’en faire le héraut. Par ailleurs, un délégué interministériel a été désigné en juillet 2004 pour prendre en charge le développement durable et mener et coordonner, au nom du Premier Ministre, le travail de tous les ministères concernés par la politique de développement durable du Gouvernement. Le délégué interministériel est responsable de la rédaction de documents soumis à la considération du Comité Interministériel sur le Développement durable (CIDD), constitué des ministres pertinents et présidé par le Premier Ministre ; il est chargé d’assurer leur supervision et de veiller à leur mise en œuvre. Il préside également le Collège des Hauts Fonctionnaires du développement durable pour le compte du CIDD et est associé à la définition de l’ordre du jour du Conseil national du développement durable.

Pour assurer la cohérence au sein de la SNDD français, des projets stratégiques nationaux sont en cours d’élaboration aux niveaux régional (PASER) et départemental (PASED) sous l’autorité d’un préfet représentant le Gouvernement.

Pour suivre l’avancement, la SNDD fait l’objet de deux rapports annuels remis au Parlement. Ces rapports, comportant chacun deux jeux d’indicateurs, couvre deux grands thèmes : l’état du développement durable en France (45 indicateurs), et l’état d’avancement de la mise en œuvre de la SNDD. Le premier rapport annuel sur la mise en œuvre de la SNDD a été présenté au Conseil des Ministres le 1er décembre 2004. Un tableau de bord très lisible a aussi été constitué ; il indique l’état de la mise en œuvre des 500 activités de SNDD, et il est mis à jour tous les six mois. Les rapports et le tableau de bord sont accessibles publiquement sur le site Web du Ministère de l’Écologie et du Développement durable et sur le site du Premier Ministre.

Un autre but de ce projet est de mettre au point une méthode d’évaluation pour la Stratégie, avec un cadre d’indicateurs servant à effectuer le suivi au jour le jour de la mise en œuvre par rapport à huit objectifs nationaux de développement durable définis par les hauts responsables chargés du développement durable.

Ce projet et la revue par les pairs de la SNDD de la France (voir ci-dessous) constituent la première étape de l’évaluation de la SNDD à mi-parcours en 2006, avant sa révision en 2008.

4. La revue par les pairs de la SNDD de la France

4.1. Cadre

Suite à une proposition de l’Union Européenne, lors du sommet mondial sur le Développement durable en 2002, visant à développer un système favorisant le partage d’expériences, la France s’est engagée à soumettre sa SNDD à un examen mutuel des autres pays. Pour assurer le suivi, un projet a été lancé en 2004 par le Gouvernement français avec la participation de l’Institut International pour l’Environnement et le Développement (IIED) pour élaborer une méthodologie et faciliter le processus national.

4.2. Les examinateurs

L’exercice de revue par les pairs de la SNDD française a été réalisé par la Belgique, le Ghana, l’Île Maurice et le Royaume Uni. L’examen a rassemblé des représentants de chaque participant, appartenant tant au gouvernement qu’à la société civile. Un rapport a été présenté lors de la 13e session de Commission de l’ONU sur le Développement durable. Il semble que cela ait été un effort significatif quant au partage d’information.

4.3. Méthodologie

Le projet visait à mettre au point et à tester une méthodologie d’examens mutuels des SNDD, dont le partage d’information sur les processus SNDD, en se basant sur l’exemple de la Stratégie française. Outre les pairs, des représentants de la Commission Européenne, du Département des Affaires Économiques et Sociales des Nations Unies (ONU/DAES) et de l’Organisation de la Francophonie y ont aussi participé. L’objectif de ce type d’examen pouvant varier d’un pays à l’autre, il a été suggéré d’utiliser une approche basée sur un choix parmi diverses options.

4.4. Recommandations et rapport final

Les recommandations des pairs sont présentées dans quatre sections :

– Processus- portant sur l’élaboration de la SNDD et sur les rôles et contributions des acteurs clés;
– Contenu – évaluer la structure et le contenu de la stratégie, ses principaux thèmes et questions, et les actions proposées ;
– Mise en œuvre et résultat – faire des commentaires sur les activités et les initiatives entreprises depuis l’adoption des SNDD et leurs résultats en faveur du développement durable;
– Suivi et indicateurs – mesures de suivi de la mise en œuvre des SNDD, et indicateurs de l’état de développement durable du pays et de mise en œuvre des actions de SNDD .

Le rapport final sur le processus d’examen par les pairs inclut aussi les expériences des pays examinateurs selon ces quatre aspects. Le rapport et l’ensemble de la documentation correspondante sont disponibles sur le Web (www.nssd.net et www.developpementdurable.gouv.fr).

4.5. Avantages

Le but de l’examen mutuel était de montrer que ce type d’examen peut avantager à la fois le pays concerné et un public plus large. Un atout marquant de cette méthodologie était son approche sans jugement, basée sur le partage d’expérience et l’apprentissage, au travers d’un effort efficace en termes de coûts et réalisé en un temps relativement court. On espère que la méthodologie pourra être utilisée par d’autres pays, qu’elle pourra être davantage élaborée, et que cette approche aidera les pays dans leur avancés vers le développement durable.

4.6. Réunion d’examen

Pour tester l’intérêt d’autre pays envers le processus d’examen par les pairs, un Réunion du Groupe d’Experts sur l’Examen de la Stratégie nationale de développement durable s’est tenue au siège des Nations Unies à New York les 10 et 11 octobre 2005. Cette réunion, organisée par l’ONU/DAES en partenariatavec le Gouvernement Français, a mis en lumière l’expérience française et mis en perspectived’autresinitiatives internationales sur les SNDD, entre autres celle de l’OCDE, celle de l’Union Européenne et celle du PNUE. Le rôle crucial des SNDD a été souligné, et divers pays participant ont exprimé leur intérêt pour l’organisation d’un examen mutuel ou d’un échange similaire permettant de tirer des enseignements de l’expérience des autres.

5. SNDD et gouvernance internationale

Le développement durable cherche à corriger le type de développement le plus en vogue actuellement (ou de « sous-développement le plus en vogue » dans le cas de certains pays) en intégrant de nouvelles approches sur le plan des politiques. Ses principaux objectifs sont : préserver le patrimoine naturel pour les générations futures ; gérer les biens publics au niveau mondial et local ; préserver les fonctions de base de l’écosystème et ses services qui soutiennent le bien-être des êtres humains ; et faire accepter davantage la responsabilité sociale sur les questions environnementales et sociales par le grand public. Ces processus doivent viser la gouvernance à quatre niveaux : mondial, régional, national et local.

5.1. Trop d’initiatives non coordonnées

Outre l’élaboration et l’examen des stratégies nationales de développement durable, il demeure un important défi au niveau du pays : la coordination de la grande variété de processus internationaux portant actuellement sur le développement durable. Celles-ci ont été lancées par nombres d’institutions, de conventions et de réseaux qui ne communiquent pas suffisamment entre eux. L’ONU a lancé un grand nombre d’initiatives mondiales, outre les accords multilatéraux, traitant de questions liées au développement durable, dont : les Objectifs du Millénaire pour le Développement; la Commission de l’ONU sur le Développement durable; les Stratégies de Réduction de la pauvreté ; l’Évaluation de l’Écosystème du millénaire ; et le Réseau Mondial des Biens publics.

D’autres processus concernent les relations public-privé, comme le Pacte Mondial, l’Initiative mondiale sur les rapports de performance , et le Processus de Marrakech sur la Consommation et la Production Durables. Divers processus de définition de normes portent sur l’environnement, comme la norme ISO 14001 et l’éco-étiquetage. La responsabilité sociale est abordée au travers du processus ISO 26000, tandis que l’étiquetage géographique peut indiquer la provenance d’un produit. On peut aussi mentionner un grand nombre d’initiatives privées sur le commerce équitable, l’agriculture biologique, la responsabilité sociale et la comptabilité.

D’autres liens au niveau mondial doivent aussi être abordés dans ce contexte, comme l’intégration des questions environnementales dans les travaux de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), et l’exportation de la pollution par les pays industrialisés vers les pays en développement.

Une importante question émerge alors : Comment mobiliser et coordonner les activités des nombreux acteurs qui sont actuellement actif en développement ? La France considère que la création d’une Organisation des Nations Unies pour l’Environnement (ONUE) pourrait donner plus de cohérence aux politiques internationales en matière d’environnement. Il semble, par ailleurs, qu’on puisse aborder pertinemment cette question sous l’angle du concept de ‘gouvernance’, qui couvre les processus et systèmes de fonctionnement des organisations ou des sociétés humaines.

La gouvernance est un processus qui invite et contraint à la fois les acteurs dans des relations d’interdépendance, en l’absence d’une instance politique suprême. Cette gouvernance est basée avant tout sur la coopération. La gouvernance ne remplace pas les systèmes de gouvernement et de pouvoir, mais sur certains aspects (dont la plupart des aspects concernant le développement durable), les modes d’autorité traditionnels ne peuvent pas lui être efficacement appliqués.

Les politiques actuelles des organisations internationales sont fragmentées et peu coordonnées ; chacune possède ses propres affinités et son propre cercle. Ainsi, la Banque Mondiale tend à avoir pour interlocuteurs les ministères des finances, le PNUE les ministères de l’environnement, et des types de rapports différents sont soumis selon les pays, selon différents cadres, en soulignant différents aspects du développement durable.

Stratégie nationale de développement durable peut jouer un rôle important pour assurer la cohérence entre les programmes sectoriels, comme indiqué ci-dessus. Cependant, le mécanisme d’examen par les pairs pourrait aussi permettre de réunir autour de la table non seulement les pays examinateurs mais aussi les organisations internationales actives dans un pays donné. Cette procédure pourrait leur permettre de coordonner leurs interventions de façon pratique au niveau du pays.

5.2. Traduire les questions d’environnement en objectifs de développement

Les priorités et objectifs en matière d’environnemental doivent se traduisent en objectifs de développement, ce n’est pas le cas pour l’instant. Diverses stratégies liées aux processus autres que les SNDD sont peu claires dans leurs dispositions par rapport aux objectifs environnementaux, par exemple la récente résolution de l’Assemblée générale adoptant la conclusion du sommet mondial de 2005 (ONU 2005). Cette résolution propose « d’adopter en 2006 au plus tard et de mettre en oeuvre des stratégies nationales de développement pour atteindre les buts et objectifs de développement convenus au niveau international, notamment les Objectifs du Millénaire pour le Développement» (ONU 2005 :4, §22a); « répondant à leurs stratégies nationales de développement à long terme» (ONU 2005 :9, §34). Cependant, bien qu’elle fasse plusieurs fois référence aux stratégies de développement relatives aux questions sectorielles – telles que la réduction de la pauvreté (§47); les plans intégrés de gestion et d’utilisation efficace de l’eau, l’accès à l’eau potable et aux services d’assainissement de base (§56h); les ressources humaines, la science et la technologie (§60c); ou l’élimination de l’offre comme de la demande en drogues illicites (§114) – elle ne mentionne qu’une seule fois le terme de ‘stratégie nationale de développement durable (§55c), associé à l’adaptation aux effets du changement climatique.

Néanmoins, dans la lignée de textes plus récents sur le développement durable, notamment le Rapport de synthèse sur l’Évaluation de l’Écosystème du millénaire (MA 2005), il semble que la résolution de l’Assemblée générale sur la Conclusion du Sommet mondial de 2005 doive être comprise comme exprimant l’idée que les stratégies nationales de développement et les stratégies nationales de développement à long terme sont étroitement liées aux stratégies nationales de développement durable.

Deux questions doivent donc être abordées :
– Comment coordonner les stratégies nationales de développement complètes émergeant du sommet mondial de 2005 avec les stratégies nationales de développement durable souhaitées par le Sommet de Johannesburg en 2002 ? et
– Comment traduire les questions environnementales en stratégies nationales et internationales de développement ?

6. Niveau national et niveau local

6.1. Parties prenantes et Conseils de développement durable

L’implication et la participation de toutes les parties prenantes a été un thème récurrent du discours sur le développement international depuis le Sommet de la Terre de Rio de Janeiro en 1992. Selon le réseau européen de Conseils consultatifs sur l’Environnement et le Développement durable (EEAC), « la participation des parties prenantes et de la société civile doit être encouragée et étendue », et il recommande aux pays de créer des conseils sur le développement durable. Ces conseils « sont un mécanisme spécifique pour susciter le dialogue entre les différentes parties prenantes, favoriser les approches et solutions innovantes et parvenir à des accords (non prévus initialement) » (Niestroy 2005:12).

Des déclarations similaires ont aussi été faites lors d’un atelier qui s’est tenu en mai 2005 et réunissant des conseils sur le développement durable des pays francophones, concernant la mise en œuvre des propositions du Sommet de Johannesburg « pour renforcer leurs mécanismes institutionnels pour le développement durable, y compris au niveau local, (… ) l’encouragement à des approches participatives », et « renforcer le rôle et les capacités des autorités et des parties prenantes locales pour la mise en oeuvre d’Action 21 » (ONU 2002a: §166-167).

Il convient de noter qu’en France, le Conseil national du développement durable (CNDD) a participé à d’examen de la SNDD par les pairs, conjointement avec des représentants des organismes correspondants dans les pays examinateurs.

6.2. L’ Agenda 21 local

Au niveau local, on rencontre des problèmes de coordination similaires. L’intégration verticale des SNDD, au niveau national, avec l’Agenda 21 local (sa contrepartie au niveau local) revêt une grande importance. L’existence d’une stratégie mondiale aide les instances locales à coordonner leur travail avec les instances nationales et avec les intérêts des parties prenantes . Pour certains aspects, la cohérence est cruciale, notamment pour la mise au point d’indicateurs.

Il est intéressant de noter que la définition originale de l’Agenda 21 local dans le document de l’Agenda 21 de 1992 n’est guère différente des approches plus avancées des SNDD aujourd’hui, soit 13 ans plus tard : « Il faudrait que toutes les collectivités locales instaurent un dialogue avec les habitants, les organisations locales et les entreprises privées afin d’adopter « un programme Action 21 à l’échelon de la collectivité ». La concertation et la recherche d’un consensus permettraient aux collectivités locales de s’instruire au contact des habitants et des associations locales, civiques, communautaires, commerciales et industrielles, et d’obtenir l’information nécessaire à l’élaboration des stratégies les plus appropriées. Grâce au processus de concertation, les ménages prendraient davantage conscience des questions liées au développement durable. Les programmes, les orientations et les dispositions législatives et réglementaires appliqués par les collectivités locales pour réaliser les objectifs d’Action 21 seraient évalués et modifiés en fonction des programmes d’Action 21 adoptés à l’échelon local. Les stratégies pourraient également servir à appuyer des projets de financement local, national, régional et international. » (ONU 1992: §28.3).

Cette définition souligne l’importance du partage d’information entre les différentes parties prenantes au sein d’une collectivité locale. À plus grande échelle également, beaucoup de réseaux actifs contribuent au partage d’expérience, tel que ICLEI (Local Governments for Sustainability : Conseil international pour les initiatives écologiques locales) ou EuroCities (réseau de grandes villes européennes). Un autre aspect important est la coopération entre instances locales.

7. L’implication d’autres parties prenantes

7.1. Des conseils scientifiques pour prendre de bonnes décisions

La question des conseils scientifiques a souvent été abordée par rapport aux approches basées sur les indicateurs. Certes, ces outils sont importants, mais il reste à savoir comment apporter des connaissances dans la prise de décision. Certains indicateurs composites, comme l’empreinte écologique, ont une base scientifique plus controversée, mais possèdent une capacité de forte mobilisation politique, comme nous l’avons observé plus haut par rapport au discours du Président Chirac à Johannesburg.

Comme nous l’avons déjà relevé, il faut davantage de cohérence au niveau international, notamment à propos des décisions à fondement scientifique. La création d’un Mécanisme International d’Expertise Scientifique sur la Biodiversité (IMOSEB), dont le processus de consultation a déjà débuté, pourrait aider à renforcer le rôle des données scientifique dans la gouvernance internationale en matière d’environnement, à informer l’opinion publique et à aider la prise de décision par les instances publiques au niveau internationale. Les décideurs politiques doivent être informés et guidés dans leurs choix par expertise scientifique de haut niveau, internationalement reconnue et facile à exploiter, à même de fournir des informations au niveau mondial comme au niveau local. L’information scientifique aiderait aussi à améliorer la cohérence et la coordination, dont la convergence des normes dans les processus environnementaux mondiaux, et le développement durable dans son ensemble.

À cet égard, le Rapport d’Évaluation de l’Écosystème du millénaire (MA 2005), qui porte sur les services liés aux écosystèmes, offre de nouveaux arguments pour l’intégration des préoccupations environnementales dans les Objectifs du Millénaire pour le Développement et les questions fondamentales touchant les SNDD.

7.2. SNDD et préoccupations économiques

Enfin, le pilier économique du développement durable, c’est-à-dire le monde des affaires, peut aussi être abordé au travers de stratégies nationales et locales de développement durable. C’est une question majeure, même pour ceux qui ont une vision traditionnelle du développement.

Les récentes Conclusions du Sommet mondial de l’ONU en 2005 dessinent une vision axée sur la création d’ un environnement national attrayant pour les investissements, grâce, entre autres, à un climat d’investissement transparent, stable et prévisible, où les contrats sont respectés, où l’on respecte la propriété et la loi, et correspondant à des cadres politiques et réglementaires aptes à soutenir les activités commerciales.

Le développement durable soulève aussi la question inverse: comment les affaires peuvent-elles contribuer au développement durable et à la production de biens publics locaux et mondiaux ?

Depuis la CDD 6 en 1998, il est clair que la contribution du monde des affaires est essentielle pour faire du développement durable une réalité. En 1999, le Secrétaire Général de l’ONU Kofi Annan a lancé l’initiative du Pacte Mondial visant à faire participer les entreprises aux objectifs sociaux et environnementaux. Les compagnies signataires du Pacte ont été contactées en juin 2005 à Paris à propos d’une contribution aux Objectifs du Millénaire pour le Développement. Encourager le secteur industriel à améliorer ses résultats sur les plans social et environnemental grâce à des initiatives volontaires concernant, par exemple, des systèmes de management environnemental, des codes de conduite, des mesures de certification et la publication d’information sur des questions environnementales et sociales, en tenant compte d’éléments tels que les normes de l’Organisation internationale de normalisation (ISO) et les directives de l’Initiative mondiale sur les rapports de performance (Global Reporting Initiative ou GRI) concernant les données relatives à la durabilité » (ONU 2002a: §18a). Cette situation est en cours d’évolution dans le contexte de la responsabilité sociale des entreprises (RSE).

Les références fixées par le Réseau de Conseils européens consultatifs sur l’environnement et le développement durable (Niestroy 2005) prenaient en compte trois approches fondamentales de la RSE en tant que contribution des entreprises aux stratégies de développement durable. Les mouvements faisant la promotion de la RSE sont présents dans la plupart des pays, mais ne sont, pour l’instant, pas coordonnés avec les SNDD.

7.3. ISO 26000

Des innovations importantes pour l’évolution des processus de SNDD devraient émerger des négociations en cours de l’ISO sur la responsabilité sociale. La norme ISO 26000 prévue pour fin 2008 offre des orientations sur la responsabilité sociale selon les meilleures pratiques. Elle est pertinente pour toutes les organisations, et non seulement pour les entreprises commerciales. Les auteurs du présent document recommandent qu’elle soit largement appliquée.

La principale question faisant l’objet de négociation est la relation entre les initiatives bénévoles et les obligations contraignantes (comme les déclarations et conventions pertinentes des Nations Unies). Relativement au droit international du travail, un document pertinent à cette discussion est le protocole d’accord signé le 4 mars 2005 entre l’Organisation Internationale du Travail (OIT) et l’ISO « en vue de faire en sorte que toutes les normes internationales de l’ISO dans le domaine de la RS (Responsabilité sociale), et toutes les activités de l’ISO qui s’y rapportent, soient conformes et complémentaires à l’application de normes internationales du travail dans le monde entier, dont les droits fondamentaux du travail » (OIT/ISO 2005). D’autres organisations internationales font aussi partie de ce processus, comme les organisations de liaison de catégorie D , avec le Groupe de travail sur la Responsabilité sociale : PNUE, CNUCED, UNODI, DAES, OMS, OCDE et d’autres, telles que le Pacte Mondial de l’ONU et l’Initiative mondiale sur les rapports de performance (GRI : Global Reporting Initiative).

La structure des conditions de négociation et de la spécification de conception d’ISO 26000, convenue à Bangkok en septembre 2005 (ISO 2005), pourrait être utile pour la mise en œuvre des SNDD. La Section 2 du texte, par exemple, fait allusion à des références et des documents normatifs, qui doivent être lus conjointement avec la norme d’orientations. Les conventions internationales devraient aussi figurer dans cette section de la norme.

Les questions abordées par l’ISO concernent aussi la législation nationale et les objectifs identifiés dans les stratégies nationales de développement durable. Le processus de SNDD devrait aborder ces considérations, et les faire connaître aux pouvoirs publics et aux entreprises du pays. Ce lien entre public et privé est un nouveau défi pour les SNDD et les concepteurs des politiques.

8. Conclusion

Les stratégies nationales de développement durable (SNDD) ne doivent pas être vues comme des obligations imposées aux pays, mais comme des mécanismes puissants de mise en œuvre du développement durable et d’intégration des questions environnementales dans les activités de développement. Les stratégies nationales de développement durable peuvent aussi contribuer à faire le lien entre les défis locaux et les préoccupations mondiales et les politiques sectorielles, ainsi qu’à intégrer les connaissances scientifiques dans la définition des politiques, c’est-à-dire à résoudre les questions de gouvernance pour accélérer la mise en œuvre du développement durable. La riche expérience de divers pays par rapport à ces stratégies forme un cadre cohérent qui peut être partagé entre les nations au moyen de l’examen par les pairs.

Bien que chaque pays soit souverain pour définir sa propre voie vers le développement durable, la coopération et le partage d’information peuvent être d’un grand secours pour rendre le processus plus efficace. Nul pays ne peut dicter à un autre ce qu’il doit faire, mais processus d’examen par les pairs, s’il est basé sur la coopération et la reconnaissance de l’égalité entre les pays industrialisés et les pays en développement, peut dynamiser le partage des connaissances et faciliter l’adaptation à des situations spécifiques. Un tel processus peut aussi être instauré entre les pays d’une même région, en mettant en jeu la relation entre stratégies régionales et stratégies nationales.

Le cadres multilatéraux de l’ONU ne sauraient ignorer les autres initiatives, telles que la Norme d’orientation de l’ISO sur la Responsabilité sociale (ISO 26000), en cours de discussion dans le cadre d’une négociation entre secteur public et secteur privé. Celles-ci doivent viser la cohérence avec les stratégies nationales de développement durable.

Références

Atelier Collaboratif pour les Conseils Nationaux de Développement durable dans les Pays Francophones . 11-13 mai 2005, Paris. Organisé par l’Institut de l’Énergie et de l’Environnement de la Francophonie (IEPF) et le Conseil national du développement durable de France (CNDD).

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OIT/ISO 2005. Protocole d’entente entre le Organisation Internationale du Travail et l’Organisation Internationale pour la Standardisation dans le domaine de la responsabilité sociale. ISO/TMB/WG SR N 18. 4 mars

ISO 2005. Norme d’Orientation de l’ISO sur la responsabilité sociale – ISO 26000. ISO/TMB/WG SR. N 49.

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Niestroy, I., 2005. Sustaining sustainability, a benchmark study on national strategies towards sustainable development and the impact of councils in nine EU Member States. Background study No. 2, EEAC Series, the Hague. European Environment and Sustainable Development Advisory Councils (EEAC).

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Cet article est paru en langue anglaise : Natural Resources Forum 30 (2006) 136-145