Jean Luc Mélenchon semble réussir son OPA contre les Verts en deux étapes. L’achats des actions, c’est à dire les voix, au premier tour par l’appel au vote utile a été suivies par une offre publique d’achat en échange de circonscriptions. Ce scénario fait l’affaire de l’aile extrême gauche des Verts dont une grande partie s’était ralliée à lui dès le premier tour. Avec 30 ans d’intervalle il réussit ce que le PS avait réussi en son temps.
Le parti des Verts a été toujours été traversé par deux tendances, comme en Allemagne où les Grünen avaient nommé ces tendances réaliste et fondamentaliste. Le système fédéral allemand a permis aux réalistes d’expérimenter dans les länder en nouant des alliances à droite et à gauche.
En France la tendance d’extrême gauche des Verts faisait de la lutte contre le système capitaliste le préalable pour résoudre les problèmes écologiques. L’autre tendance envisageait la question sous l’angle du changement des institutions de l’intérieur, ouverte aux alliances politiques et des solutions permises par le monde économique, l’économie sociale et solidaire et plus largement les entreprises orientées vers la responsabilité sociétale.
Cette composante réaliste n’a pas pu s’organiser en tant que telle. Dès le début des années 90, en son sein Dominique Voynet et Yves Cochet, ont fait l’alliance avec le Parti Socialiste au prix de l’élimination de la tendance plus autonome qualifiée de ni droite ni gauche, conduisant au départ d’Antoine Waechter et à une véritable purge.
Le PS n’attribuant des circonscriptions qu’à la tendance qui leur était favorable, a donc déterminé l’évolution du parti des verts. Le déclin du Parti Socialiste a laissé la place, ces dernières années, à un nouveau rapport de forces dans l’alliance PS-Verts plus favorables aux Verts. L’effondrement du Parti Socialiste au profit de la France insoumise conduit aujourd’hui à une alliance nouvelle qui va privilégier la frange d’extrême gauche des Verts en lui attribuant les circonscriptions gagnables.
La primaire Yannick Jadot / Sandrine Rousseau concrétisait le clivage réaliste fondamentaliste. Si Jadot s’est imposé sur le fil dans la primaire des Verts, il n’a pas pu contenir l’hémorragie des votes vers Mélenchon qui incarnait mieux et de façon plus crédible la vision d’extrême gauche.
Emmanuel Macron incarne aux yeux de l’extrême gauche des Verts le capitalisme mondialisé, avec une critique essentialiste qui ne laisse aucune place au débat.
La stratégie d’ouverture d’Emmanuel Macron en direction de l’écologie devrait viser ceux qui développent les solutions et les alternatives. Il devrait à la fois, renforcer politiquement cette tendance en lui réservant des circonscriptions et développer les initiatives et les solutions.
Son ralliement à la planification écologique ne manque pas d’interroger, alors qu’il devrait pouvoir se rallier à trois approches qui le démarqueraient clairement de l’extrême gauche écologiste.
Affirmer l’importance de la science et de la connaissance comme fondement des politiques à tous les niveaux. La crise écologique, celle du climat, de la biodiversité et des ressources, entraîne certes des conséquences visibles, mais seule la science, la modélisation et les connaissances scientifiques en climatologie et écologie, lui donnent l’ampleur qui permet d’anticiper les évolutions à venir. Placer la connaissance scientifique au cœur de l’action, la considérer comme une institution, c’est lutter directement contre le populisme, qui fondamentalement considère le citoyen légitime et capable de construire par sa seule expérience les objectifs politiques.
Deuxième enjeu c’est l’obligation de résultats. La politique occupe le champ des procédures, du cadre juridique et des moyens. Or l’environnement impose de se poser la question des impacts réels c’est à dire les résultats, et celle des limites écologiques. Une planification centralisée de la contrainte ne laisse pas d’espace à la flexibilité et au développement de solutions nouvelles. Une politique écologique devrait reposer sur une contractualisation généralisée sur objectifs. Les collectivités par exemple, devraient se voir assignées, au même titre que l’Etat, l’objectif européen de réduction de 55% des gaz à effet de serre en 2030. L’Etat ne soutiendrait que les actions s’intégrant dans des stratégies crédibles permettant d’atteindre ces objectifs.
Troisième enjeu l’innovation et la créativité. Elle ne se résume pas à quelques technologies clés sur le marché mondial, mais aussi à des innovations locales et frugales, à l’innovation sociale et au changement des modes de consommation et de production. Reconnaitre l’innovation collective et ouverte c’est reconnaitre l’importance des faiseurs, notamment des jeunes impliqués dans l’action et les solutions. Ce serait une occasion d’interactions positives avec la société pour combattre le populisme.
Ces trois approches seraient de vraies ruptures politiques, mais un second mandat permet d’ouvrir des pistes nouvelles. Jacques Chirac n’avait-il pas intégré l’environnement dans la Constitution lors de son second mandat ?