Devenu l’un des engagements prioritaires du pays, le développement durable nécessite une coopération sans faille entre tous les ministères concernés, ce qui lui vaut d’être piloté par un délégué interministériel, Christian Brodhag. En poste depuis bientôt un an, cet ancien dirigeant des Verts mesure le chemin parcouru et, surtout, celui qui reste à faire.
Où en est, d’après vous, la prise de conscience dans notre pays ?
Il faut savoir si les Français savent ce qu’est le développement durable, et s’ils font quelque chose en ce sens. Suivant les enquêtes, un tiers d’entre eux se dit informé et voit bien que le concept va au-delà de l’environnement. Mais depuis deux ans, les chiffres stagnent. Il faut dire qu’il manque un discours appuyé qui sensibiliserait en permanence nos concitoyens. Mais sur différents thèmes, dont celui de la responsabilité individuelle du consommateur, cela avance. Par exemple, la lutte contre l’effet de serre se traduit de plus en plus dans les choix personnels. Reste à savoir si ce changement est suffisant pour atteindre les objectifs fixés.
Comment mesure-t-on les progrès accomplis dans ce domaine ?
Il y a deux indicateurs qui me paraissent importants. D’abord, les dégagements de gaz à effet de serre: l’objectif est de limiter à 2° maximum l’accroissement de la température moyenne, ce qui se traduira quand même pour nous par un été caniculaire comme en 2003 environ tous les deux ans. Mais pour cela, il faut que, dans le monde entier, on divise par 2 l’émission des gaz à effet de serre d’ici à 2050 et que les pays industrialisés, eux, les divisent par 4. Cet engagement implique qu’en France, on les réduise de 3 % par an durant les 45 prochaines années. On est très loin du compte. Autre indicateur : l’empreinte écologique. C’est la surface de la Terre, toutes ressources comprises, correspondant à la consommation d’un individu. Aujourd’hui, la surface disponible est de 2 ha par Terrien, or un Américain a une empreinte de 10 ha et un Français, de 6 ha. Il s’agit de trouver, sans se priver, un mode de vie agréable qui permette de beaucoup plus économiser les ressources rares. Le cap que nous prenons est bon, mais la vitesse est bien trop lente.
Quelle est, selon vous, l’action la plus urgente pour l’avenir de la planète ?
Il n’y a pas un sujet, un endroit sur Terre que l’on puisse isoler. Le catégoriel et le local ne suffisent pas : l’enjeu est mondial. Il faut inventer un nouveau modèle économique, social et technologique. Cela passe par des institutions internationales, l’équivalent pour le développement durable de l’Organisation mondiale du commerce. Il faut accentuer la responsabilité environnementale des entreprises, afin, par exemple, que les concepts de type « commerce équitable » sortent de la marge et soient vraiment partagés. L’urgent, comme tout se tient, c’est d’avoir une vision globale partagée par tous.
Qu’est-ce que chacun en France peut faire d’immédiatement efficace ?
Les comportements à adopter sont de mieux en mieux connus et acceptés. C’est l’intérêt, en particulier, du Défi pour la Terre lancé par la fondation Nicolas Hulot et l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME). Pour le développement durable, chacun peut agir avec son caddie® et par ses choix quotidiens. Par exemple, en mangeant des produits de saison qui ne sont pas transportés à grands frais ni produits sous serre. Ou encore en privilégiant les produits labellisés, comme les ampoules basse énergie qui consomment moins et durent plus longtemps. Il existe maintenant dans le bâtiment et l’automobile ce genre de produits qui ont fait la preuve de leur sobriété. Voilà le mot clé des comportements responsables.
Article publié dans le Parisien