Préventique n°156, janvier 2018, pp44 45, PDF article dans la revue
La question climatique a deux volets complémentaires. Le premier est l’atténuation, c’est-à-dire la réduction des émissions des gaz à effet de serre. Le second est l’adaptation aux changements climatiques. Cette adaptation est une démarche d’ajustement au climat actuel ou attendu, ainsi qu’à ses conséquences. Dans les systèmes humains, il s’agit d’atténuer ou d’éviter les effets préjudiciables et d’exploiter les effets bénéfiques. Dans certains systèmes naturels, l’intervention humaine peut faciliter l’adaptation[1].
Longtemps l’adaptation a été négligée. Elle apparaissait même comme une sorte de capitulation, un alibi pour ne pas agir. L’adaptation touche des domaines variés qui dépendent des pays. Pour les pays tropicaux il s’agit de la mise en place de processus de gestion des risques dus à la sécheresse, aux inondations et aux cyclones tropicaux. Pour les iles intertropicales (les petits états insulaires comme les DOM TOM pour la France) se rajoutent les risques dus à la montée des eaux et à la dégradation des barrières de corail. Mais les pays tempérés sont aussi concernés par des évènements climatiques extrêmes, par le recul du trait de côte, la disparition de la neige en altitude…
Alors que l’indicateur pour l’atténuation est simple, la tonne de CO2 équivalent émis, du fait de la variété des impacts l’atténuation est plus difficile à caractériser. Elle touche souvent la gestion de risques existants mais dont la gravité et la fréquence sont aggravées par les changements climatiques.
L’arrivée de l’adaptation dans l’agenda politique international est venue progressivement tant au niveau scientifique que politique.
La communauté scientifique réunie au sein du GIEC s’est organisée en trois groupes de travail. Le 1er s’intéresse aux moteurs des processus climatiques, c’est-à-dire aux modèles climatiques, le deuxième groupe s’intéresse à l’impact des changements climatiques sur les écosystèmes et la société et leur vulnérabilité. Enfin le 3ème groupe du GIEC s’intéresse au développement socio-économique. Ce dernier groupe a été largement dominé par les travaux sur la fiscalité et les mécanismes de marché pour l’atténuation. L’adaptation y a progressé en lien avec les résultats du groupe 2. L’affinement des modèles régionaux donne en effet aujourd’hui une base plus solide pour envisager les questions d’adaptation.
La négociation sous l’égide de la convention s’est attachée, elle aussi, dans un premier temps à l’atténuation, et la question de l’adaptation était plutôt envisagée à travers la compensation vers les pays en développement. Les pays du Sud subiraient les conséquences des émissions dont les pays du Nord seraient responsables. Cette dichotomie Nord Sud s’efface en partie. Tous les pays doivent avoir aujourd’hui une stratégie de réduction des émissions des gaz à effet de serre formalisée dans un document la « contribution prévue déterminée au niveau national » (CPDNs, ou INDCs en anglais) qui intègre une communication sur l’adaptation notamment un Plan national d’adaptation (PNA).
Les différentes politiques menées sous l’égide de la convention, les transferts de technologie, le renforcement de capacité et les financements donnent une part croissante à l’adaptation. Le renforcement de capacité des pays en développement vise l’appropriation au niveau gouvernemental des outils d’alerte précoce, de la planification d’urgence et des stratégies de transfert des risques.
Le Fonds vert pour le climat, qui assurera une part substantielle des financements sur le climat, visera un équilibre entre l’atténuation et de l’adaptation. Des outils financiers nouveaux sont mis en place, comme la Mutuelle panafricaine de gestion des risques qui vise à assurer 30 pays Africains en leur offrant une couverture de 1,5 milliards US$ des risques climatiques.
Un processus d’examen technique des mesures d’adaptation permettra de recenser les possibilités concrètes de renforcer la résilience, de réduire les facteurs de vulnérabilité et d’accroître la connaissance et la mise en œuvre des mesures d’adaptation.
Sur le plan français, créé en 2001 à l’initiative Paul Vergès, l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique en France métropolitaine et dans les départements et territoires d’outre-mer (ONERC)[2] collecte et diffuse les informations sur les risques liés au réchauffement climatique, et formule des recommandations sur les mesures d’adaptation. Enfin l’ONERC assure la liaison avec le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Sous l’égide de l’ONERC un premier plan sur l’adaptation a été publié en 2007. Le second plan devrait paraître avant la fin 2017[3]. L’approche française d’adaptation distingue plusieurs niveaux : l’adaptation autonome ou spontanée sans intervention publique, l’adaptation incrémentale limitée dans ses effets et enfin l’adaptation transformationnelle celle qui change les éléments fondamentaux. Cette dernière est la plus difficile à conduire sur le plan politique. En toute logique, elle devrait conduire à un repli stratégique, accepter le recul du trait de côte par exemple sans chercher à l’endiguer par des mesure aussi coûteuses que provisoires, ou maintenir de la neige artificielle dans les stations de ski.
Les régions sont en train d’élaborer leur Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (STADDET)[4] qui doit intégrer la question de l’adaptation. Du fait de sa parution tardive, la seconde stratégie nationale aura du mal à être intégrée dans des plans dont l’élaboration est largement engagée.
[1] https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/adaptation-france-au-changement-climatique
[2] http://www.senat.fr/leg/ppl99-159.html
[3] A l’heure où nous écrivons ces lignes nous n’avons pas eu accès au document.
[4] Décret n° 2016-1071 du 3 août 2016