Au moment où il disparait, je souhaite évoquer un souvenir précis d’une rencontre avec Bernard Tapie qui éclaire sa personnalité. Au début années 90, j’étais alors porte-parole des verts, j’accompagne Antoine Waechter pour un rendez-vous rue des Saint-Pères dans l’hôtel particulier de Bernard Tapie. Déjà engagé en politique il allait devenir ministre quelques temps après.
Il nous reçoit de façon très conviviale dans un grand salon. Avant de commencer les échanges, il nous montre le mobilier et les tableaux. « Vous voyez tout cela m’appartient. Tous ces hommes politiques vivent dans les ors de la république, et s’accrochent au pouvoir pour y rester. Tout cela est à moi, quand j’arrêterai la politique je vivrai encore ici. A la différence des professionnels de la politique, je suis désintéressé ».
Ces mots me sont revenu, de façon ironique, quand trois ans plus tard le Lyonnais faisait saisir son mobilier, à la une des JT.
Ensuite c’est le patron de la Vie Claire qui s’exprime. « Vous voyez je suis engagé depuis dix ans, et avant tout le monde sur l’écologie, en donnant accès à tous au bio. L’écologie doit être accessible au peuple« .
Difficile de placer un mot, il voulait nous convaincre qu’il était écolo sincère.
Mais le temps passe. J’avais un autre rendez vous, peu après avec une radio locale parisienne. Je lui demande s’il pouvait me donner accès à un téléphone pour prévenir la radio de mon absence. Il me dit bien sûr, et il nous fait alors du Bernard Tapie.
« Qu’est ce qu’est cette radio que personne connaît, qu’allez vous faire dans un endroit pareil, vous méritez mieux, vos idées méritent mieux. Il faut passer au 20h de TF1 et ne pas perdre du temps avec des radios de seconde zone. » Nous lui répondons bien sûr que nous ne demandions pas mieux.
« Pas de problème j’appelle Patrick Le Lay, demain et vous passerez. »
Bien entendu nous attendons encore.
Nous sommes sorti de cet entretien plus grands qu’en rentrant, mais sans avoir obtenu quoique ce soit.
C’était semble-t-il, la marque de fabrique de Tapie, j’ai entendu, l’avocat stéphanois maitre Buffard dire la même chose et décrire une entrevue d’Éric Cantona avec Bernard Tapie. Le footballeur est remonté comme une pendule et prêt à en découdre dans un litige accompagné par son avocat. Tapie le désamorce rapidement et lui gonfle la tête en soignant l’ego du joueur. Cantona ressort content mais bredouille.
Bravo l’artiste.