Serge Antoine nous a quitté ce samedi de printemps. Je perds un ami, le développement durable perd un de ses pères. Je le retrouvais souvent sur différents terrains comme celui de la francophonie. Lors de notre dernier entretien, je lui demandais son soutien pour un projet, il me dit que son soutien et sa confiance m’étaient bien entendu acquis. Mais il me l’a dit avec une de ces formules dont il avait le secret : « toi c’est moi et moi c’est toi ». Le bonheur dans la vie est de pouvoir avoir des amis de cette qualité.
Plusieurs messages ont rendu hommage à Serge Antoine : le communiqué du Ministère de l’écologie et du développement durable, la dépêche de Médiaterre. Un entretien avec Thierry Paquot dans la revue urbanisme nous le refait revivre.
En regardant Google News outre la dépêche de Médiaterre je trouve un article daté du dimanche 26 mars 2006 le lendemain de sa mort : Les libertaires face à l’utopie, entre critiques et projets qui identifie chez Serge Antoine ce souci « libertaire » « Le catalogue de l’Exposition « À la recherche de la cité idéale » d’Arc-et-Senans en 2000, publié en 2001, le même souci « libertaire » s’y manifeste dans les diverses introductions. Serge ANTOINE et Jean DEDOLIN y affirment que l’utopie « est la respiration du monde », à condition que s’ouvrent « plusieurs futurs possibles » ».
Quel symbole pour un grand commis de l’Etat, qui conçoit les régions dans les années 50 en en traçant les frontières (Serge Antoine – L’homme qui a dessiné les régions – L’Express du 15/03/2004), qui rejoint la DATAR, en 1963 pour travailler avec Olivier Guichard puis Jérôme Monod, et qui a été le collaborateur direct de Robert Poujade dans le premier ministère de l’Environnement en 1971.
Dans son entretien avec Thierry Paquot il a donné récemment une définition du développement durable dans laquelle je me retrouve assez bien « Disons simplement qu’il faut éviter de prolonger la simple approche environnementale et qu’il est nécessaire de s’alimenter de manière systémique aux sources de l’économie, de la culture, du social en même temps que de l’écologie, que l’allongement en prospective est indispensable, qu’il faut transformer tout le monde en “acteurs” et si possible monter des opérations multiacteurs, qu’il faut jouer du volontariat et que les indicateurs de mesure du suivi sont indispensables. »
Et sa savoureuse expression « La politique de développement durable peut s’affiner. Elle se fait en marchant, un peu comme L’Homme invisible qui devient visible quand on lui pose des bandelettes. » Oui c’est la contribution de chacun qui façonne le contour de ce développement durable. Je me rappelle très précisément quand il nous a proposé cette définition lors d’une réunion de l’IEPF au bord d’un lac canadien gelé.
Deux articles récents de Serge illustrent ses engagements : Liaison Énergie-Francophonie numéro 68 : Culture et développement durable : L’éducation au développement durable, et son dernier article dans DATAR prospective 2030.